Quand ceux qui prétendent défendre l’économie romande se mettent à parler comme des relais de Bruxelles, il devient urgent de rétablir la vérité. En soutenant les « nouveaux accords » avec l’Union européenne, la Fédération des Entreprises Romandes ne défend ni les PME, ni la prospérité suisse : elle cautionne une mise sous tutelle juridique rebaptisée “opportunité stratégique”. Ce discours n’a rien d’une analyse économique — c’est un renoncement politique. Lorsqu’un lobby autrefois respecté reprend mot pour mot les éléments de langage de l’UE, cela ne révèle pas une vision : cela révèle une capitulation intellectuelle, le choix assumé d’oublier ce qui a fait la force de la Suisse, et ce qui conditionne encore aujourd’hui sa liberté.
Il y a des prises de position qui relèvent de l’erreur, d’autres de l’aveuglement — et certaines, plus rares, relèvent de la trahison conceptuelle. La déclaration récente de la Fédération des Entreprises Romandes (FER) en faveur des « nouveaux accords » avec l’Union européenne appartient sans ambiguïté à cette dernière catégorie.
La FER n’a pas simplement défendu une stratégie économique discutable : elle a repris point par point les éléments de langage de Bruxelles, contre les intérêts fondamentaux de la Suisse, de sa souveraineté et de sa démocratie directe.
Et il faut le dire clairement : ces accords ne sont ni bilatéraux, ni équilibrés, ni négociés. Ce sont des Accords Unilatéraux III, c’est-à-dire la reprise du droit européen sans siège, sans voix, sans veto — avec des mesures compensatoires en cas de refus.
La FER le sait. Pourtant elle persiste.
1. Le mensonge du “bilatéral”
Dans sa communication, la FER parle d’« approfondissement de la voie bilatérale », de « continuité économique », de « stabilité réglementaire nécessaire à l’emploi ».
C’est un lexique habile, rassurant, calibré pour effacer l’essentiel : le contenu même des textes.
Car les traités proposés instaurent une intégration juridique asymétrique, pilotée par Bruxelles, où la Suisse se retrouve contrainte d’adopter — automatiquement ou quasi-automatiquement — des pans entiers du droit européen. Le Parlement n’aurait plus qu’un droit de veto sous chantage, sous menace de sanctions.
Appeler cela « bilatéral », c’est renommer une laisse en « corde d’escalade ».
2. La fiction de la prospérité “garantie”
La FER assure que ces accords sont nécessaires pour « garantir l’accès au marché ».
Ce narratif masque deux réalités :
- Le libre-échange n’est nullement menacé. Il repose sur l’Accord de 1972 — autonome, intact, juridiquement solide, et indépendant de l’UE.
- La compétitivité suisse provient de la liberté, pas de la réglementation importée depuis Bruxelles.
Le véritable risque pour nos entreprises n’est pas la souveraineté helvétique, mais la bureaucratisation européenne, déjà responsable de plus d’un million de pages de règles et d’une croissance stagnante.
Le choix est simple :
La Suisse veut-elle être une économie agile — ou un sous-traitant réglementaire de l’UE ?
3. La stratégie de la peur : l’arme préférée de la FER
Il ne manque jamais un ingrédient dans ces campagnes : la rhétorique de l’effroi.
- « Perte d’accès au marché »
- « Risques pour l’emploi »
- « Isolement »
- « Affaiblissement de l’industrie d’exportation »
- « Incertitudes pour nos PME »
C’est la recette habituelle : remplacer l’analyse par le chantage émotionnel.
Mais la Suisse ne doit pas renoncer à son modèle parce que quelques lobbys redoutent de devoir innover plutôt que de s’aligner.
4. Une capitulation intellectuelle
La FER aurait pu défendre :
- la neutralité réglementaire,
- l’innovation helvétique,
- la flexibilité économique,
- la démocratie directe comme avantage comparatif.
Au lieu de cela, elle s’est muée en antichambre romande d’Economiesuisse, récitant la même litanie :
« stabilité », « prévisibilité », « intégration », « partenariat ».
Des mots creux, mais efficaces pour dissimuler un renoncement majeur :
l’abandon méthodique de la souveraineté économique suisse.
Conclusion : La Suisse n’a pas besoin de porte-voix de Bruxelles
La FER prétend défendre l’économie romande.
En réalité, elle défend une vision dans laquelle la Suisse renonce à sa liberté d’organiser son propre marché, son propre droit, son propre avenir.
Une vision où les entreprises helvétiques cessent d’être souveraines — pour devenir conformes.
La Suisse n’a jamais prospéré en s’alignant, mais en s’affranchissant.
Elle n’a jamais brillé par la soumission, mais par l’invention.
Les Accords Unilatéraux III ne sont pas une voie d’avenir.
Ils sont un détournement de la voie bilatérale, une attaque directe contre la démocratie directe, et l’aveu d’une élite économique qui préfère la facilité de l’obéissance à l’exigence de la liberté.
La FER a choisi son camp.
Le peuple suisse choisira le sien.